lundi 11 juin 2012

La Voie Du Guerrier : un Chemin Royal



Au sein de mon enseignement, les arts de combat ont une place particulière.

À l’origine, la partie physique de la Voie ne possède qu’une petite partie dédiée au combat : en revanche, la façon de travailler est très différente de ce qui se voit dans les arts martiaux traditionnels.

Dans les arts martiaux que l’on peut croiser dans notre monde moderne, il y a :

  • le travail des positions de bases,
  • l'apprentissage des frappes de base,
  • le travail technique seul et à deux,
  • le combat souple et libre.

Nous sommes là, bien souvent, dans une recherche d’efficacité en « combat », ce qui signifie plutôt : « en combat souple rituel où on reste à bonne distance pour se toucher ».

Dans ma tradition, les exercices de combat et la recherche sont antérieurs à la mode des formes chorégraphiées de combat, des « kata » et autres.

Nous utilisons pourtant, pour la formation des débutants, ces techniques.

C’est aussi une façon agréable de se détendre par des gestes d’inspiration martiale.

Maintenant il y a le vrai combat, le moment où il faut se défendre et ne pas prendre de risque, respectant le précieux de sa vie et les responsabilités que l’on peut avoir envers sa famille : perdre n’est pas une option.

Dans ces cas-là, extrêmes, mais tellement réalistes dans notre monde en mutation, il faut rester beaucoup plus pratique grâce :

  • au travail de la peur et de l’intention,
  • au travail des impacts et de la force brute,
  • et à tout le reste (techniques, vitesse, déplacements).

Avant tout, dans notre école, nous allons travailler sur la façon de tenir son esprit, son agressivité et de gérer ses peurs face à la douleur.

La première chose dans le combat c’est : « y aller ou pas ».

Tant que mon esprit et mes émotions me paralysent ou me forcent à une analyse profonde au lieu d’agir… rien n’est possible !

Bien entendu, il n’est pas question de se transformer en brute idiote qui frappe sans raison ; au contraire, il est important de mettre en place des valeurs et des limites après lesquelles il est temps d’agir.

Les entrainements de ceux qui ont choisi les « arts de combat » vont beaucoup aller chercher nos peurs, nos fantasmes.

C’est très dur et je suis toujours épaté par la force de caractère des gens que je croise : je me rappelle à quel point ce fut difficile pour moi aussi.

Quand on travaille l’aspect mental, psychologique, il est bon de commencer à travailler la force.

C’est une force d’impact qui nous intéresse, une force pour faire passer trois genres de qualités :

  • la lourdeur (qui fait peur à celui qui la reçoit),
  • la pénétration (une qualité d’étrangeté),
  • la séparation (pour casser, détruire).

La grande difficulté de ce travail, c’est qu’il n’est possible qu’avec un partenaire, pas avec un sac ou un poteau.

Il faut donc passer du temps non seulement à s’entrainer, mais aussi à subir les moments d’entrainements de ses « frères d’école ».

Le professeur ne montrait autrefois les frappes (en les démontrant) qu’aux élèves à qui il acceptait de transmettre.

C’est autre chose que de répéter des mouvements dans le vent.

De plus, dans l'ensemble et pour la plupart d'entre nous, ça ne sert pas à grand chose dans notre monde moderne et paisible.

Le reste du travail, c’est le travail des arts martiaux habituel : formes, exercices, techniques et « lutte ».

En quelque temps, le corps change visiblement et les qualités de combat vont rendre la technique obsolète.

Mais en quoi cet enseignement a sa place aujourd’hui ?

Le dépassement de soi, de ses peurs et la capacité à être conscient de ses actions est la recherche principale de toutes les traditions d’évolution personnelle : les arts de combat c’est exactement ça !

C’est une confrontation à ses peurs les plus fondamentales et un développement de l’attention, avec en plus, une sensation de sécurité dans un corps plus fort.

Le niveau de stress pour un pratiquant de la voie guerrière n’est pas le même que chez les autres gens : il est donc capable de gérer le stress et le conflit avec beaucoup de tact.

Tous ceux qui ont tenté de suivre cette voie difficile en sont satisfaits… C’est toujours un plus de se dépasser et de laisser derrière soi les fantasmes de ses force et de ses faiblesses.

Se connaître, mais par le corps et ses capacités cachées : ne plus avoir peur, savoir se défendre physiquement et psychologiquement.

Ayant été un enfant fragile, maigrelet et faible, je vois aujourd’hui que les exercices énergétiques m’ont donné la santé, mais les arts de combat m’ont donné la force et l’assurance qui me permettent d’enseigner ma tradition aujourd’hui.

Ceux qui ont peur devraient tous passer par les arts de combat, mais ce n’est possible que si on en a envie : il ne faut pas se forcer, il faut accepter qu’il n’est pas toujours temps de faire cette recherche.

Dans le monde d’aujourd’hui, avec ses forces et ses limites, la culture d’une force intérieure est vraiment nécessaire… mais pourquoi ne pas y rajouter la force extérieure ?

Plus fort, sans anxiété dans les rapports avec les autres, il est plus facile de communiquer et d’échanger.

Sachez que tout le monde à sa place dans cette voie guerrière et que personne n’est trop faible, trop léger ou trop vieux.

La seule chose à prendre en compte est la volonté, le plaisir de se confronter aux autres pour se connaître soi-même : sans cette envie, il ne faut pas le faire.

Il ne faut pas non plus confondre le goût des arts de combat ou son absence de goût pour cela avec la peur que l’on peut ressentir : si c’est de la peur qui limite ma recherche, alors il faut foncer.

« Aller vers ce qui fait peur, le reste est ennuyeux » disait Trungpa.

samedi 9 juin 2012

Paradoxe Inévitable ...


- « Pourquoi pratiquer ? », - « Pourquoi je devrais pratiquer ? »,
- « Que va m’apporter la pratique ? »

Cette façon de se poser la question, tout comme nous nous demanderions ce que va nous apporter tel nouveau produit de régime ou telle nouvelle paire de chaussures, n’est pas la bonne façon.

L’envie, l’attente ou encore la projection dans la réussite de notre pratique, le but que nous nous fixons ou le besoin que nous cherchons à combler, tout cela est précisément ce que la pratique cherche à apaiser, ce que l’entraînement veut éliminer.

L’attente de « gagner » quelque chose, d’acquérir ou d’aboutir à quelque chose va amener une déception inévitable : ce que donne la pratique n’est jamais ce que nous attendons.

La pratique cherche à nous libérer du besoin d’acquérir ou de gagner, l’entrainement veut nous faire toucher une perception du réel qui nous dégage de nos faux besoins.

La pratique va nous procurer la seule vraie paix possible, la seule vraie voie vers le bonheur : la Voie va nous offrir la possibilité d’être heureux par nous-mêmes, une joie qui vient de l’intérieur et non de l’extérieur.

Cette réalisation, qui vient de l’intérieur, ne peut trouver de satisfaction dans une projection externe, dans une attente dans le temps ou dans un changement dans le monde : c’est par notre changement intérieur que la perception du Monde change, que la vie devient simple et sans soucis.

C’est la seule et vraie liberté, c’est le seul et vrai bonheur.

Cet équilibre qui conduit à la liberté et à la perception de la réalité, ce chemin est interne et indépendant de nos désirs.

Les désirs de réussir dans notre voie et les envies de bien faire, les faux choix qui nous conduisent à désirer des états ou tout ce qui nous construit des attentes malades, tout ce fatras nous propulse dans le monde externe et nous éloigne de notre bien-être interne.

La pratique nous permet d’arrêter de désirer d’être un bon pratiquant, l’enseignement nous construit et nous fait abandonner nos idées de succès pour nous réaliser profondément.

Ce qui est difficile, c’est qu’en lisant ces lignes vous vous dites : « je comprends »... pourtant, c’est sûrement plus compliqué que ça !

Personne ne veut souffrir vraiment, personne ne veut être l'esclave de son mental et vraiment personne ne souhaite dépendre de ses désirs et en subir les frustrations...

Notre nature profonde est paisible et joyeuse, c’est ce que nous avons accumulé par dessus qui nous pose problème et c’est avec ces déséquilibres que nous souhaitons accéder à notre bonheur : notre vision de la réalisation est construite par un esprit conçu et éloigné de la réalité.

Notre pratique nous libère si nous lâchons prise par rapport à bon nombre de préjugés et seul le temps nous donnera cette chance : suivons les chemins de notre Voie personnelle et tout s’éclaircira doucement.

Il n’y a pas de voie rapide, il n’y a pas de raccourcis, mais il y a des voies complètes et des enseignants compétents.

"Pourquoi pratiquer ?
- Pour se libérer de l’envie de se réaliser, uniquement parce qu'on a confiance dans sa Voie."

lundi 4 juin 2012

Do Ut Des !



Que nous promet la Pratique et que peut-on en attendre?

Cette question n’est pas la bonne.

La question est plutôt :

« Que sommes-nous prêts à donner à la Voie, en temps et en efforts, pour notre évolution ? »

Ce que la Voie donne, comme une récolte juste, c’est ce qui fut semé au départ.

Il n’est pas utile de demander sans donner et la Voie en est un exemple sans compromis : c’est par nos actions, à multiples niveaux, que le retour se fera et que notre évolution suivra.

Plus notre Pratique devient « sacrée » et importante, plus le retour sera sacre et important.

Plus la Voie est au premier plan dans notre vie, plus les bienfaits seront primordiaux.

Il est inutile de penser que discuter ou parler d’un sujet peut amener une quelconque transformation, elle ne peut venir que du fait d ancrer le sujet dans le Monde, de passer le concept dans le Yin, d agir et faire.

Il ne faut pas demander ce que la Voie peut faire pour vous, mais ce que vous pouvez faire pour la Voie ( ;) )

C’est pour cela que toutes les pratiques (réelles et anciennes) sont bénéfiques, car toutes les Voies amènent au même sommet (par des chemins plus ou moins abordables).

Rendez votre pratique importante, sacrifiez lui du temps et des efforts, investissez vous profondément... et le retour est incroyable... magique dirait-on !

Il existe effectivement des secrets, mais ils sont devant vous, juste là : ils ne demandent qu a être éclaires par votre engagement, votre droiture et votre sincérité.

Encore aujourd’hui un des élèves a compris un concept primordial qu’il avait appris il y a plus de 8 ans...

Nous ne savons plus assez ce qu’est l’engagement et l’abandon dans une Voie, c’est même mal vu aujourd’hui.

Mais que pouvons-nous attendre d’une tradition dont nous doutons ou d’un enseignement qui pose trop question ?

Il est important de tester, de passer un peu de temps à vérifier que cela nous convient, mais ensuite il n’est plus temps de chipoter, de chouiner ou de supputer... il faut plonger, apprendre et laisser les changements se faire.

Il nous est possible de toucher un peu a tout et de vouloir créer notre propre style, notre propre façon de faire... mais sérieusement, qu'allons-nous réaliser au cours d une vie comparée aux traditions millénaires ?

Un peu d’humilité tout de même !

Voilà un peu de matière à penser pour l’été...