lundi 4 avril 2011

Chinoiser n’est pas Pratiquer

A l’origine, les quatre peuples avaient leur Voie propre, leur tradition.

Il est dit dans la tradition que les êtres humains avaient chacun leur voie : ceux qui étaient à l’orient et à l’occident, ceux qui vivaient sur le vieux continent et ceux qui glorifiaient la raison.

D’après l’enseignement oral, chaque peuple devait suivre sa voie et était imperméable aux autres traditions : en effet, les archétypes et les façons de faire étaient trop différents pour comprendre une voie qui venait d’un autre peuple.

Puis les gens ont voyagé un peu, puis beaucoup et en peu de temps, tout le monde est allé partout.

La mixité des peuples dans tous les endroits du monde a mis en contact des traditions et des gens très différents : dans ces conditions, qui peut apprendre quoi ?

De plus, incapable de se satisfaire de ce que l’on a, un attrait plus important existe pour les enseignements qui ne sont pas « locaux ».

Il y a plusieurs lois pour qu’il soit possible d’évoluer au sein d’une tradition qui n’a pas ses racines dans notre environnement immédiat :

  •     l’enseignement doit être global,
  •     l’enseignant ne doit pas être un chercheur sur ce qu’il transmet,
  •     La Voie doit prendre sens dans notre culture.

L’enseignement doit être global


Dans une tradition qui est globale, la dimension de l’étude est humaine : de là, c’est une voie de l’être humain et elle dépasse le temps et l’espace.

D’où que provienne la tradition, si elle parle de tous les aspects du fonctionnement de l’homme, c’est une voie d’évolution qui fonctionnera pour tous.

Si elle est teintée par sa culture d’origine et qu’elle omet trop de choses par rapport au groupe humain visé et ayant des recherches spécifiques, alors cette voie n’est pas adaptée à tous.

Les enseignements qui viennent de religieux qui vivent isolés du monde sont difficilement adaptables à notre vie survoltée, en rapport constant avec trop de nos semblables.

Les enseignements qui se basent sur la prise d’hallucinogènes, bien souvent illégaux et dangereux, qui proviennent de rites initiatiques uniques, ne doivent pas se transformer en excuses bien faibles pour se « défoncer ».

Ou encore les techniques ésotériques qui sont dépassées par notre évolution humaine : dans une humanité qui se sensibilise à l’écologie et à l’importance d’intégrer les concepts de bonheur et de découverte de soi, il est limité de croire aux licornes et aux baguettes magiques…

Certaines traditions ont aussi grandi dans un but précis qui n’est plus d’actualité : des arts martiaux se voulant non violents dans un monde d’après guerre, des techniques respiratoires qui se basaient sur une ignorance de notre cerveau ou encore des mouvements religieux qui cherchaient une façon de réunir le peuple pour se révolter.

La Voie se doit d’être intemporelle ou chacun se retrouve comme si les mots avaient été écrits pour lui.

L’enseignant ne doit pas être un chercheur sur ce qu’il transmet


S il est très important que le professeur soit toujours en recherche et en évolution, il ne doit pas être pour autant dans le processus de se former dans ce qu’il transmet.

La voie transmise doit être comprise dans son ensemble, profondément, sinon on devient un voleur et un menteur.

La réalité nous montre qu’il est possible de ne rien savoir et de l’enseigner ouvertement, mais ce n’est pas parce que ça existe que c’est acceptable.

Il n’est pas possible de se faire avoir : si on pose des questions, si on essaye et si on regarde l’enseignant, il est assez facile de sentir si oui ou non il est cohérent.

Ne pas connaître un style ou un enseignement n’est pas une raison pour oublier de faire appel à son bon sens commun et aux quelques valeurs que nous avons tous.

La tradition doit être claire, précise et explicable en langage simple : si ce n’est pas possible, alors ce n’est pas compris.

L’enseignant doit avoir fait le tour de ce qu’il enseigne, il ne doit pas être un chercheur mais un pratiquant.

L’idée d’apprendre pour transmettre n’est pas juste : les formations de « futur maitre de la voie » n’ont pas de sens, ce sont des aberrations d’aujourd’hui.

La Voie doit prendre sens dans sa culture


Il est idiot de devoir se transformer pour entrer dans une voie, de devoir apprendre une langue ou s’habiller bizarrement : la Voie va nous transmuter dans notre état naturel.

Si on se sent obligé d’imiter une autre tradition pour mieux comprendre sa voie, celle-ci n’est pas globale ou celui qui le fait est un paresseux : en effet, un des aspects de la paresse est de singer pour ne pas avoir à faire, d’imiter pour créer un personnage spirituel au lieu de s’exposer réellement à une transformation.

S il est intellectuellement intéressant de se poser des questions culturelles et historiques sur sa tradition, le besoin de s’immerger pour pratiquer n’est pas juste.

Tous les mots, toutes les notions et tous les exercices doivent pouvoir avoir un sens dans sa tradition et sa culture, dans sa langue d' origine.

Il est important de pouvoir expliquer clairement à un néophyte les buts et recherches de sa voie, sans avoir besoin de se servir de mots spécifiques ou de concepts absents dans le sens commun de son interlocuteur.

Attention aux voies qui vont vous faire perdre du temps, au besoin de s’habiller en orange, au salon qui fume a cause de l’encens, la vie n’est pas infinie et la voie est longue : nous sommes sur une longue route, un chemin montant, poursuivi par les ombres qui peuvent nous rattraper…

Bonne pratique à tous, quelque soit votre Voie.